Rappel : 12 juillet
journée nationale d’action, de mobilisation et de grève, avec en particulier appel à grève totale du In et du Off en Avignon.

Pour info, le 7 juillet en Avignon, 100 compagnies du Off étaient en grève, 30 ont joué et versé leurs salaires aux caisses de grève. Occupation et blocage de la Fnac pendant deux heures avec débat et décryptage à l'intérieur. Puis occupations en simultanée de FO et CFDT.

LETTRE OUVERTE À LA FÉDÉRATION DES SYNDICATS DES ARTS DES SPECTACLES, DE L'AUDIOVISUEL, DE LA PRESSE, DE LA COMMUNICATION ET DU MULTIMÉDIA FO (FASAP-FO), NOUVEAU SIGNATAIRE DU PROTOCOLE DE 2003 AGGRAVÉ PAR LES ACCORDS SUR L’ASSURANCE CHÔMAGE DE 2006 ET 2014.

Madame Françoise Chazaud, Secrétaire générale de la Fasap-Fo.

Nous sommes contraints de répondre publiquement à vos communiqués et déclarations multiples depuis le 22 mars dernier qui mêlent approximations et mensonges dans une magnifique campagne de désinformation.

Non, votre signature n'a pas sauvé le régime spécifique d'assurance chômage des artistes et techniciens du spectacle, du cinéma et de l'audiovisuel.

Cet argument, utilisé depuis plus de 10 ans par la Cfdt, vous l'aviez dénoncé dans tous vos tracts depuis la réforme de 2003. Votre mémoire vous joue des tours : seule la mobilisation des artistes et des techniciens, permanents comme intermittents, et le fantastique rapport de force créé ainsi sur tout le territoire auront permis

de préserver ce qu'il reste, depuis 2003, de notre régime spécifique, face à un Pierre Gattaz déterminé cette fois-ci à liquider les annexes 8 et 10. Malheureusement il n'aura pas suffi à préserver les autres régimes particuliers comme l'annexe 4 des intérimaires et des intermittents du régime général. Votre signature aura permis au Medef de réduire à néant la prise en compte des spécificités de la discontinuité de l'emploi adapté aux diverses professions concernées en « massacrant » le régime des intérimaires et des salariés à activités réduites.

Non, votre signature n'est pas une bonne nouvelle. Nous la vivons comme un coup dans le dos (en souvenir de la déloyauté des négociations de couloir avec le Medef auxquelles vous avez participé).

Lors de la manifestation du 20 mars dernier, vous aviez distribué un tract qui a été repris à l'occasion de vos interventions sur notre camion sono. Il reprenait vos positions exprimées lors des Assemblées générales. En substance : 507 h sur 12 mois, date anniversaire préfixe, 365 jours d'indemnisations. Vous proposiez même alors la grève générale pour l'obtenir !
De fait, le 22 mars à 0h30 vous avez avalisé : 507 h sur 10 mois et 10 mois et demi, période flottante, 243 jours d'indemnisation, c'est-à-dire la confirmation de la refonte néfaste de 2003. Cette voltefacen’est ni plus ni moins qu'un reniement, une trahison du mouvement auquel vous participiez.

Non, votre signature n'est pas une attaque contre le pacte de responsabilité et le plan d'austérité que vous dénoncez.

Bien au contraire ! Le plan d'austérité de 50 milliards sur 3 ans annoncé par le gouvernement inclut les 2 milliards d'économies sur le régime d'assurance chômage. Dans son discours de politique générale à l’Assemblée nationale, Manuel Valls l’a confirmé. L'accord que vous venez de signer consacre ces économies en les faisant reposer en presque totalité sur les chômeurs, intérimaires et intermittents (il est à noter que les seuls employeurs mis à contribution sont ceux du spectacle).

Ainsi, selon les derniers chiffrages de l'Unedic, si 120 00 chômeurs peuvent bénéficier des droits rechargeables (à condition d’accepter n’importe quel petit boulot), 440 000 vont voir, eux, leurs droits amputés de 3 jours en moyenne par mois, ce qui représente une baisse de 10 % des revenus mensuels. Merci !

Si 9 % des salariés intermittents étaient touchés avant l'accord que vous venez de signer par la carence, aujourd'hui, ce sont 47 % qui vont être frappés par le nouveau différé. Celui-ci n’est suspendu que pour quelques mois, dans l’attente de la concertation, mais figure bien en toutes lettres dans le texte agréé. Quel progrès social et merci de cette conquête !

Non, contrairement à ce que vous exprimez à présent, il n’y a pas de « déficit » des annexes 8 et 10 pour un milliard d’€, qui représenterait 25% du déficit global de l'Unedic.

De la sorte, vous reprenez les pires argumentaires du Medef et de la Cfdt auxquels ils ne croient pas eux-mêmes puisque l’Unedic parle de 320 millions de « surcoût » des annexes. Il s'agit là de la remise en cause de la solidarité interprofessionnelle. Son principe est que les cotisations de celles et ceux qui travaillent en CDI ou en CDD couvrent les allocations chômages et le fonctionnement de l'institution.

Les comptes des régimes spécifiques des travailleurs relevant d'activités discontinues ne sont pas par nature équilibrés.
Ainsi ce « déséquilibre » est de 1 Milliard pour les annexes 8 et 10, 1,5 Milliards pour l'annexe 4, plus de 8 Milliards pour les CDD du régime général (activités réduites) et 4,4 Milliards pour les ruptures conventionnelles. Le déficit annuel de l'Unedic (qui intègre le remboursement des emprunts) s’élève à 4 Milliards.

Rappelons que les intermittents représentent 3,5 % des demandeurs d’emploi et 3,4 % des dépenses de l’Unedic.

Le responsable du déficit du régime interprofessionnel, c'est le chômage de masse, la politique d'emploi du patronat, les plans de licenciement, les délocalisations, le recours à des CDD de plus en plus courts (80% des embauches). L'accord que vous avez signé dédouane le patronat de ses responsabilités en la matière et fustige les chômeurs, intérimaires, intermittents et précaires.

Non, nous n'avons jamais demandé l'intervention de l'Etat dans le financement de la solidarité interprofessionnelle.

Vous savez très bien que nous luttons contre toute idée de caisse « autonome » et de financement de la protection sociale par l'Etat. Vous le savez fort bien puisque la Cgt Spectacle lutte contre depuis plus de 20 ans. L'article 2 de la PPL, déposée le 3 mars 2005, auquel vous faites référence, précise : « les charges éventuelles qui résulteraient pour les régimes sociaux de l'application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 1001 du code général des impôts. »
Il ne s'agit en aucun cas de faire payer par l'impôt la protection sociale, mais le règlement de l'Assemblée nationale impose à toute proposition parlementaire de loi de financer les nouvelles dépenses qu'elle entrainerait. C'est la seule justification, habituelle et formelle, de cet article.
L'ensemble des débats et conférences de presse du comité de suivi appelait à remettre à plat la réforme de 2003 au sein de la solidarité interprofessionnelle, contre toute idée de financement des annexes 8 et 10 par l'impôt.
Nous vous mettons au défi de trouver le moindre écrit, la moindre intervention de la Cgt Spectacle allant dans le sens de vos affirmations.

Oui, votre signature est une volteface totale par rapport aux positions que vous défendiez depuis 1992.

Le syndicalisme n'a pas besoin aujourd'hui de postures qui s’apparentent à la trahison, à la remise en cause de la démocratie sociale et à la soumission aux desiderata du patronat.

Fidèles à ses engagements et ses orientations, la Cgt Spectacle et ses syndicats continueront à appeler à amplifier la mobilisation contre cet agrément, pour l'ouverture de réelles négociations loyales et la remise à plat des annexes 8 et 10 et du régime d'assurance chômage.
Nous attendons avec impatience le prochain virage à 180° vous faisant revenir à la position qui nous faisait lutter ensemble depuis 2003 jusqu’au 20 mars dernier.
La porte reste ouverte à la lutte unitaire sur la base de ces revendications claires.
Comme pour les élections Fnas, où la Cfdt n’est toujours pas en mesure de présenter des candidats et où Fo vient de passer de 9 à 5 sièges sur 40 dans le collège intermittents, nous laissons la profession juger de la pertinence des positions de chacun.

Salutations syndicales…

Paris, le 7 juillet 2014.